Le Conseil national de la communication du Burundi(CNC) a suspendu ce vendredi la radio britannique(BBC) et la Voix de l’Amérique(VOA) pour une période de six mois à partir du 7 de ce mois. Les deux radios sont punies pour raison de «manquements à la loi régissant la presse», et à la «déontologie professionnelle», a annoncé aux journalistes le président du CNC, Karenga Ramadhan. Il a aussi mis en garde la Radio France internationale(RFI) ainsi que plusieurs autres médias locaux.
Justifiant les sanctions prises contre ces médias, deux jours après le lancement de la campagne référendaire, le président du CNC a indiqué que la BBC, déjà avertie par le gouvernement en début de la semaine, est sanctionnée pour avoir «fait fi» à la note de mise en garde lui envoyée au mois de mars. Selon Karenga Ramadhan, la note recommandait les responsables de la radio de toujours prendre en considération les principes d’équilibre et de vérification de l’information avant toute diffusion sur le Burundi.
L’élément déclencheur est l’émission diffusée sur «BBC Afrique» le 24 avril 2018. Le CNC accuse le présentateur de n’avoir pas pu ramener à l’ordre l’invité, un ressortissant burundais. Pour l’organe, les propos tenus par l’intervenant sont « exagérés, diffamatoires, portant même atteinte à la réputation du Chef de l’Etat».
La Voice of America est, selon le CNC, sanctionnée pour avoir engagé un journaliste recherché par la justice burundaise et diffusé des informations très «tendancieuses».
Une suspension liée au référendum constitutionnel prochain ?
Les radios BBC et Voice of America sont suspendues alors que le Burundi est en pleine campagne référendaire. Le projet de révision de la constitution en cours étant controversé, les deux radios avaient, à maintes reprises, prouvé leur indépendance en tendant le micro à toutes les parties prenantes sur le sujet, affirme un observateur.
Des habitants de la ville de Ngozi (nord du pays) rencontrés lient la suspension au référendum prochain. «Le Cnc vient de fermer les seuls médias indépendants qui nous restaient. Je crois que le régime ne veut pas que la population puisse entendre les idées de ceux qui militent contre le référendum», s’indigne un habitant. « Les décideurs du pays devraient au moins se rappeler que la BBC leur donnait la parole quand ils étaient encore dans le maquis», ajoute-t-il.
Ayant des programmes en Kirundi (langue nationale) et Kinyarwanda, la BBC et la VOA étaient les radios les plus écoutées au Burundi, en grande partie, par les populations rurales. Le taux d’écoute a considérablement augmenté après la destruction de principaux médias indépendants au lendemain du putsch manqué le 13 mai 2015. N’ayant pas été sur le banc de l’école, la plupart des populations rurales ne parlent que du Kirundi. Les sanctions du Cnc frappent donc les émissions en la langue même.