L’ONU DEMANDE AU CONSEIL DE SECURITE D’AGIR SUR LA SITUATION AU BURUNDI

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Le Secrétaire Général de l’ONU, Antonio Guterres, vient de transmettre au Conseil de sécurité son rapport sur la situation au Burundi. Dans un  document de 11 pages révélé fin janvier dernier, il se dit préoccupé par le processus de changement de la constitution en cours, une démarche qui, selon lui, sans large consensus, ne peut qu’exacerber les tensions entre le régime et l’opposition. Pour Guterres, le projet risque d’anéantir les acquis de l’Accord d’Arusha.

Il faut rappeler que le  nouveau texte, une fois voté, permettrait au président Pierre Nkurunziza de prétendre à un quatrième mandat, renouvelable, qui serait de sept ans au lieu de cinq, alors que l’Accord d’Arusha limitait le nombre de mandats présidentiels à deux.

Pour Guterres, seul un dialogue constructif entre toutes les parties prenantes peut empêcher de déstabiliser davantage le pays. Le Secrétaire Général de l’ONU affirme également  que la situation socioéconomique et des droits de l’homme au Burundi est « gravement préoccupante ».

Bujumbura réagit par une manifestation

La réaction de Bujumbura ne s’est pas fait attendre : une marche de protestation a été  organisée par la mairie dans le week-end dernier, comme les autorités burundaises en ont pris l’habitude.

Ivomo s’est rendu au rond-point des Nations-Unies non loin de la permanence du parti CNDD-FDD (dans la zone de Ngagara) au nord de la capitale où se faisait le rassemblement.

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Ils se préparent à la marche
Il est 9 heures et demie.  Des manifestants continuent à arriver dans des bus Coaster, tous scandant des chansons de soutien  au président ou à la paix. Quelques responsables, en tenues de sport et en trainings, se chargent d’aligner les marcheurs qui arrivent et les préparent au départ. Des femmes et des jeunes gens devant, avec des pancartes sur lesquelles on peut lire différents messages en Kirundi, en  Français ou en Anglais. Par exemple celui-ci : « Nous dénonçons avec énergie les montages faits par l’Envoyé Spécial du Secrétaire Général de l’ONU pour le Burundi, Michel Kafando, qui a préparé ce rapport mensonger sur le Burundi » ou « Nous demandons aux pays africains et aux grandes puissances comme la Russie et la Chine qui nous ont toujours soutenus d’être vigilants lors de la prochaine réunion du Conseil de Sécurité de l’ONU prévue le 26 mai 2018 ».

A 10 heures pile, la manifestation commence. Deux  éclaireurs ouvrent le cortège avec le drapeau du Burundi dans les mains. La foule se dirige  vers le centre ville en passant par le boulevard du Peuple Murundi, la marche rythmée par la chanson : « les colons sont mauvais, leur temps est révolu ». Le mouvement continue jusqu’à l’ambassade de Belgique. Là les manifestants observent une pause et entonnent l’hymne national. Après, rassemblement  sur la place de l’indépendance. Et là commencent les discours.

Le Conseiller Principal du Maire, Ramadhan Nkurikiye, qui a pris la parole,  a  critiqué le Secrétaire Général de l’ONU en affirmant  que son rapport visait à perturber le processus de révision de la constitution en cours au Burundi et que cela était « inacceptable ». « La constitution appartient au peuple Burundais seulement. L’ONU n’a pas le droit de s’ingérer dans les affaires internes des Burundais », a-t-il déclaré devant la foule, avant de lancer des slogans demandant au gouvernement de ne pas reconnaitre le document.

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Le Conseiller Principal du Maire de la ville, Ramadhan Nkurikiye
L’Assistant Permanent du Ministre de l’Intérieur, Thérence Ntahiraja,  qui représentait le gouvernement dans cette manifestation a promis d’en faire rapport à ses supérieurs. La dispersion a eu lieu à midi.

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L’Assistant Permanent du Ministre de l’Intérieur, Thérence Ntahiraja
Des gens contraints de manifester

Certains  petits commerçants  rencontrés dans la manifestation affirmaient y avoir été forcés. « Des gens en civil m’ont obligé de fermer ma boutique et de me joindre aux autres. Je suis ici pour me protéger et protéger mes affaires », a révélé un commerçant du quartier de Kajiji à Kanyosha.  Des conducteurs de vélos disaient avoir subi  le même sort. Emmanuel* par exemple. Ce n’est pas la première fois qu’il participait à une manifestation contre son gré. Il nous a dit que refuser d’y participer est lourd de conséquences. « Tu dois venir car si tu  ne viens pas on te chasse du parking. Je suis donc ici pour ma survie. Je n’ai pas le choix », a-t-il confié.

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Il profite de l’inattention des organisateurs du mouvement pour s’échapper 
Certains semblaient même ignorer le contenu du rapport contre lequel ils étaient appelés à manifester. « On m’a dit de venir ici pour soutenir les institutions et je suis venu. Je ne sais pas précisément ce que dit le rapport mais de toute façon il n’est pas bon », a affirmé une maman de Kinama.

C’est la première fois, depuis 2015, qu’une manifestation se déroule du début à la fin sans que le Belge  Louis Michel soit cité nommément. Etant l’un de 750 députés européens, il  a à maintes reprises été accusé par Bujumbura d’être derrière les sanctions prises contre le Burundi par l’Union Européenne. Maintenant, le vieil homme de 70 ans a  annoncé son retrait de la vie politique en 2019.

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